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This Thing

Dates 25 octobre 2024 — 8 mars 2025

Heure de début Débute à 00 h 00

La pratique de Julie Favreau aborde les transformations technologiques et biologiques actuelles, en s’articulant à travers la chorégraphie, la sculpture, la photographie et le cinéma. Dans un contexte où les avancées technologiques redéfinissent nos expériences quotidiennes, l’intelligence artificielle se manifeste comme une présence envahissante et polymorphe, suscitant des interrogations et des préoccupations profondes. Partant de ces réalités émergentes, This Thing met en scène la rencontre entre une protagoniste humaine et une entité flottante à travers un dialogue gestuel. L’œuvre esquisse un univers où la technologie, dans son omniprésence et son omniscience, négocie avec la nature humaine et son environnement naturel. 

La scène se déroule dans une clairière verdoyante, où la protagoniste avance en interaction avec une nature vibrante, les chants des oiseaux et le bourdonnement des insectes se mêlant à son mouvement. C’est dans cette topologie sensorielle qu’elle entre en contact avec une apparition mouvante, une force qui se déplace autour d’elle et qui, à chaque instant, change de forme, se dérobant à toute définition fixe et aux lois de la gravité. Les deux corps paraissent alors communiquer mais leurs intentions sont difficiles à déterminer. L’interaction évoque un processus de devenir, une réciprocité où le motif demeure insaisissable. Cette présence, à la fois charnelle et intangible, joue par moments sur sa transparence sans jamais se résoudre en une configuration définitive. À travers cette dynamique, la chose n’est pas tant un objet à connaître qu’un multiplicateur de possibles. Elle peut être perçue comme une extension du corps humain, une réalité augmentée qui ouvre à de nouveaux modes d’interactivités ou comme un mécanisme complexe qui, tout en influençant les actions de la protagoniste, se laisse également influencer. À d’autres moments, elle évoque aussi l’écho d’une forme de vie nouvelle, en coévolution avec les humains dans une réalité où les frontières avec l’artificiel s’effacent progressivement. 

Projetée face à la rivière des Outaouais dans le parc de L’Imaginaire, This Thing s’intègre dans le paysage singulier d’Aylmer, où l’œuvre est recomposée à son contexte naturel. La clairière représentée y incarne un espace intermédiaire, un seuil entre la civilisation et le monde naturel. Superposé aux questions sensibles sur l’interface entre technologie et écosystèmes, l’œuvre incite à réfléchir à notre humanité et aux liens que nous établissons avec ces nouvelles réalités mais aussi avec les diverses intelligences du vivant. Quelle sera la place de la nature dans un monde de plus en plus influencé par le développement technologique? 

Julie Favreau parvient à matérialiser des images qui sont susceptibles d’éveiller un sentiment d’incertitude autant que de fascination — telles que la présence croissante de l’intelligence artificielle et les questions qu’elle soulève quant à nos interactions avec elle. Mais plutôt que d’imposer un dualisme, elle propose une vision nuancée révélée à travers des relations corporelles et dans la création de nouveaux langages : non pas dans un une logique d’assimilation mais bien comme une composante à appréhender de manière sensible, s’incarnant dans plusieurs potentialités, interrogeant notre rapport au monde et attribuant au corps un rôle central. 

Créée en 2019, l’œuvre se situe à un moment charnière, juste avant la pandémie, une période où ces questions ont commencé à s’intensifier. Aujourd’hui, elle demeure une réflexion ouverte, à laquelle l’artiste continue de contribuer à travers ses créations ultérieures. Si la protagoniste de This Thing s’aventure prudemment dans la clairière, les suivants franchissent le pas vers la forêt. 


Le projet, initialement commissarié par Aseman Sabet et présenté par le Centre d’exposition de l’Université de Montréal (CEUM), a été réalisé en collaboration avec le groupe A.I.Ship (Harvard & Petrie-Flom Center for Health Law Policy, Biotechnology and Bioethics, et ETH Zürich – Bioethics – Health Ethics and Policy Lab) dans le contexte d’une réflexion sur les enjeux éthiques, émotionnels et relationnels liés à l’intelligence artificielle en santé. L’émergence de l’intelligence artificielle (IA) comme un acteur clé dans le domaine de la santé, permet de façonner des dispositifs facilitant les diagnostics et l’évaluation de la condition physique, avec la perspective d’une intégration potentielle à notre anatomie.

Texte par Alice Ricciardi

Biographie Julie Favreau

Julie Favreau (elle) est une artiste québécoise qui vit et travaille entre Montréal et Berlin. À travers ses films, sculptures et photographies, elle crée des scénarios futuristes, dans lesquels les protagonistes participent à des rituels partagés. Ses derniers projets sont des témoins des multiples interrogations éthiques concernant les bouleversements technologiques actuels. Les questions y sont posées par le biais d’une approche sensorielle/«embodied» et spirituelle. Nous y faisons la connaissance de personnes qui interagissent avec une entité en émergence que Favreau conçoit comme un Hyperobjet (Timothy Morton). Il s’agit d’une incarnation physique en constante évolution de ce qui est omniprésent, réel pour tous : une intelligence artificielle, un virus, un corps sans organes.

Une sélection de ses récentes expositions et résidences de recherche comprend : Dusseldorf photo biennale (Germany); Musée d’art de Joliette – MAJ (Québec); Rupert (Lituanie) ; Organ vida-Zagreb photo biennal (Croatie) ; Sporobole-PRIM (Québec) ; Schwartzsche Villa (Berlin) ; Edinburgh Art Festival, Scottish National Gallery of Modern Art ; Actoral (France) ; Arsenal Contemporary (New York) ; House of Egorn (Gallery Weekend, Berlin) ; Casino du Luxembourg ; Blue Star Contemporary (Texas), Galerie im Marstall (Hambourg, Allemagne) ; La BF15 (Lyon, France) ; Künstlerhaus Bethanien (Berlin) ; Musée des beaux-arts de Montréal (Canada) ; Fonderie Darling (Montréal, Canada) ; Musée d’art contemporain de Montréal (Canada) ; Mac Quinta Normal (Chili) ; ainsi que plusieurs foires locales et internationales. 

Julie Favreau s’est installée à Berlin à l’occasion d’un concours national, lui octroyant une résidence d’un an à la Künstlerhaus Bethanien (2017). Elle a été retenue pour le Prix artistique Sobey en 2018 et en 2012 ; et est lauréate du Prix Pierre-Ayot 2014 et de la Bourse Claudine et Stephen Bronfman (2012).  Son travail a entre autres fait l’objet de critiques dans The Guardian, Magenta, Hyperallergic, Canadian Art, Taz, Berliner Zeitung, Momus. Favreau a obtenu un baccalauréat en beaux-arts axé sur la création d’images en mouvement, la performance vidéo et le cinéma de la Nouvelle Vague (UQAM-2001-2005). Elle s’est ensuite formée à la chorégraphie de façon autodidacte au Canada et en France, en participant à de nombreux ateliers dans des institutions de premier plan, et en s’engageant activement dans le milieu de la performance chorégraphiée et de la danse. Favreau est titulaire d’une maîtrise en sculpture (Concordia-2012).

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